Le « loisir à-côté » : brouillage des frontières entre le travail et le nontravail - Université Clermont Auvergne Accéder directement au contenu
Communication Dans Un Congrès Année : 2021

Le « loisir à-côté » : brouillage des frontières entre le travail et le nontravail

Résumé

Les classifications socioprofessionnelles reposent le plus souvent sur la profession : les PCS, en France, s’organisent selon une arborescence partant des professions regroupées en catégories, elles-mêmes réunies en groupes socioprofessionnels (Desrosières et Thévenot, 1992), et la nomenclature ESEG établie en 2016 par Eurostat relève d’une logique similaire (Penissat et Siblot, 2017). Ces classifications, malgré les critiques, servent d’étalon dans la plupart des enquêtes sociologiques permettant de situer socialement les individus. En les mettant en parallèle avec « l’espace des pratiques » (Bourdieu, 1979), on peut alors associer une position et un type de pratique. Par exemple, des études désormais classiques rapprochent des activités sportives (Clément, 1985) ou des « styles » (Pociello, 1983) et des publics spécifiques, identifiés par leur position socioprofessionnelle. Or, cette mise en relation peut être questionnée : Donnat et Tolilat (2003) ou Lahire (2008) ont insisté sur le caractère éclectique des pratiques culturelles; on peut aussi interroger la place respective que les individus confèrent au travail et aux loisirs (Bernard, 2010 ; Gobbé, 2019). Bien que n’étant pas professionnels et n’en tirant quasiment aucun revenu, des ouvriers vivent parfois une passion et une vocation artistique ou sportive, et déploient, dans ces activités « annexes », une expérience, des savoirs et des compétences qui font d’eux des experts. Reconnus comme tels, couronnés éventuellement de titres et de distinctions, ils restent néanmoins, du strict point de vue de la classification socioprofessionnelle, en bas de l’échelle sociale. Dès lors, pour ces ouvriers artistes ou sportifs, ces loisirs « à-côté », pour paraphraser F. Weber (1989), constituent des « activités parasites » (Freidson, 1986) : essentielles pour ces individus, elles se « greffent », pour les nécessités de l’existence, à une activité professionnelle déclassée et contraignante. Cette communication, réalisée à partir d’entretiens, repose sur deux portraits d’ouvriers, l'un devenu maître d’arts martiaux et l'autre artiste peintre. Elle vise à montrer combien ces loisirs brouillent les frontières entre le travail et le non-travail et questionne le statut de ces « hommes pluriels » (Lahire, 2005) vivant une sorte d’ubiquité sociale : non valorisés dans le champ professionnel, ils jouissent d’un prestige certain dans leur activité annexe. Et c’est cet entre-deux qui les caractérise et qu’ils vivent, conscients de leur renom tout en éprouvant la frustration et la violence de ne s’être jamais totalement affranchis de leur identité professionnelle.

Domaines

Sociologie
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Origine : Fichiers produits par l'(les) auteur(s)

Dates et versions

hal-03154308 , version 1 (28-02-2021)

Identifiants

  • HAL Id : hal-03154308 , version 1

Citer

Christophe Gobbé. Le « loisir à-côté » : brouillage des frontières entre le travail et le nontravail. Journée internationale de la sociologie du travail (reporté en 2021), Nov 2021, Lausanne, Suisse. ⟨hal-03154308⟩
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