A. Vauchez, . Sainte-brigitte-de-suède, and . Sainte-catherine-de-sienne, Pour les références à cette oeuvre hagiographique, connue sous le titre de Legenda Major, c'est à la traduction française de R.P. Hugueny que nous renverrons : Raymon de Capoue, 1904.

, et comme il manifestait sa volonté que je vous dise que vous deviez partir, moi, le priant de m'excuser car je me considérais indigne d'être l'annonciatrice d'un tel mystère, je disais : « Mon Seigneur, je te prie, si c'est ta volonté qu'il parte, de faire grandir et d'enflammer davantage son désir ». Dans sa bonté, notre doux Sauveur répondait : « dis-lui avec assurance que je lui donne cet excellent signe pour lui prouver que ma volonté est qu'il parte : plus il rencontrera d'obstacles, et plus on s'opposera à lui pour qu'il ne parte pas, plus il sentira grandir en lui une force telle qu'aucun homme ne semblera pouvoir la lui enlever, ce qui est contraire à sa nature. Je te dis que je veux qu'il lève la très sainte Croix contre les Infidèles et qu'il la lève contre certains de ses sujets, à savoir ceux qui trouvent pâture et se nourrissent dans le jardin de la sainte Église, ceux qui administrent mon sang. Je dis que sur ceux-ci je veux qu'il lève la Croix, et qu'il le fasse en pourchassant les vices et les défauts de ceux-ci. Une fois le vice arraché, la vertu est plantée en plaçant cette Croix entre les mains des bons pasteurs et bons recteurs de la sainte Église. Et s'il n'y en a pas déjà, il veut que, pour ceux qui doivent être nommés, vous veilliez à ce qu'ils soient bons et vertueux, et qu'ils ne craignent pas la mort de leur corps, p. 70 : « Montrez-vous un homme fort ! » 54. Lettre 238, p. 88 : « [?] alors que je priais pour vous notre doux Sauveur, ainsi que vous me l'aviez demandé, vol.206

, Je crois qu'il en irait de l'honneur de Dieu, et plus encore du nôtre, que vous preniez toujours soin de nommer des hommes vertueux. Si on fait le contraire, ce sera injurier grandement Dieu et dévaster la sainte Église. Ne nous étonnons pas ensuite si Dieu nous envoie ses châtiments et ses fléaux, p. 63 : « J'ai entendu dire ici que vous avez nommé les cardinaux, vol.185

, Comme Pilate qui, malgré sa conviction que le Christ est accusé par jalousie, le fait crucifier pour satisfaire aux grands prêtres, aux anciens et à la foule afin d'éviter le tumulte, les rebelles apparaissent pris dans une contradiction. « A tutti in comune loro pare avere male fatto » explique d'ailleurs Catherine un peu plus haut 62 . Ce passage montre bien comment elle utilise l'Évangile pour décrypter une situation politique, c'est-à-dire pour proposer une certaine lecture de la situation. Il en va de même lorsque, pour convaincre Grégoire XI de faire la paix avec les villes rebelles (c'est-à-dire de lever l, pp.128-127

, C'est pourquoi, sentant la puanteur de la vie de nombreux recteurs, dont vous savez qu'ils sont des démons incarnés, ils furent réduits à une telle crainte qu'ils firent comme Pilate qui, pour ne pas perdre le pouvoir, tua le Christ : c'est ce que firent ceux-ci qui, pour ne pas perdre leur importance, vous ont persécuté, Lettre, vol.196

, 65 : « vos brebis qui, en tant que rebelles, ont quitté le bercail de la sainte Église, refusant de vous obéir et de se soumettre à vous, Père ». 64. Lettre 196, Alors vous vous réjouirez [?] parce que vous aurez ramené la brebis égarée dans le bercail de la sainte Église, vol.196, p.66

. «-dites-leur and . Christ-dit-À-pierre-quand, ce dernier voulait le retenir d'aller à la passion : « "Retire-toi ! Derrière moi, Satan ! tu es pour moi une occasion de chute, car tes vues ne sont pas celles de Dieu, mais celles des hommes". Faites-en de même, très doux Père ». Ce passage fait écho à Matthieu 16, 23 selon la Vulgate : « vade post me, Satana ! scandalum est mihi, quia non sapis ea, Lettre, vol.233, pp.85-86

. On-remarque-cependant-ici-que and . Pape, détenteur du pouvoir d'excommunier ou de lever l'excommunication, et investi de l'autorité suprême sur laquelle repose l'Église. En tant que tel, le pape apparaît dans les lettres comme le successeur de Pierre (« vicario di Pietro » 66 ) et donc comme le représentant du Christ sur terre 67 . A travers ces images du berger, du gardien et de la pierre ferme, Catherine, à la manière des prophètes, renvoie donc Grégoire XI à sa mission première de pape. Qu'il s'agisse donc d'imposer une certaine lecture des événements ou d'indiquer au Pape une conduite à tenir, les références scripturaires sont utilisées par Catherine dans le but de persuader son destinataire, en fondant ses conseils sur l'autorité de la parole biblique. Catherine recourt ainsi à plusieurs passages des Écritures, qu'il s'agisse de personnages bibliques servant d'exempla (ou de « contre-exempla », comme Pilate), d'épisodes entiers ou de paraboles. Comme l'a montré Giuliana Cavallini, il s'agit rarement de renvois à l'Ancien Testament, mais plutôt d'évocations des Évangiles et des épîtres pauliniennes 68 . Si ces références scripturaires sont constantes dans l'écriture catherinienne, elles ne sont presque jamais présentées comme des citations à proprement parler. Dans les lettres aux Papes en effet, on ne trouve qu'un seul exemple de renvoi explicite, dans la lettre 239 : « come dice il nostro Salvatore nel suo Santo Vangelio » 69 . Mais la plupart du temps, aucune formule de ce type ne vient marquer la distance entre la parole catherinienne et l'auctoritas biblique à laquelle elle se réfère. Il s'agit alors d'un type de renvoi plus subtil, presque d'un simple écho, d'une réminiscence biblique au plan lexical concernant une expression ou un mot, voire le sens spécifique donné à un mot. C'est ce que Alvaro Grion appelle les « riecheggiamenti » 70 . Ainsi l'expression utilisée à deux reprises pour introduire une lettre fait-elle écho à une formulation biblique. En fin de souscription en effet, au moment d'exprimer la motivation de sa lettre, Mais c'est surtout à travers certaines métaphores bibliques que Catherine rappelle au Pape ses devoirs. Ce n'est pas un hasard si les lettres à Grégoire XI sont littéralement tissées de renvois à l'image du berger, du gardien et de ses clefs, de la pierre ferme et stable. Ces trois images illustrent en effet les fonctions principales du pape : responsable de l'ensemble des chrétiens

G. Cavallini, ». Fonti-neotestamentarie?, and C. , Lettre 239, p. 90 : « comme le dit notre Sauveur dans son saint Évangile, vol.69, p.45

A. Grion, S. Caterina-da, and . Siena, , 1953.

, « Je vous écris dans le désir de voir en vous

, Lettre, vol.206, p.68

, 104 « dans le désir que j'ai longtemps désiré » ; cf. Luc 22, 15 : « desiderio desideravi hoc pascha manducare vobiscum, Lettre, vol.270

G. Cavallini, ». Fonti-neotestamentarie?, and C. , , p.55

, 64 : « on n'attire jamais le coeur de l'homme autant que par l'amour » ; cf. Jean 6, 44: « nemo potest venire ad me, nisi Pater, qui misit me, Lettre, vol.196

. Desiderato, décrypte, à travers son regard prophétique, les évènements de l'époque selon une dimension transcendante. Or si elle a été choisie par Dieu, comme Brigitte de Suède avant elle, c'est aussi en raison de son statut, afin que la vérité élémentaire, qui n'est plus entendue par les clercs, s'exprime par la bouche d'une simple femme. Dès lors, elle ne peut revendiquer à la fois une élection divine et l'accès direct à l'écriture. Dans ce sens, les intermédiaires masculins, des secrétaires aux éditeurs, qui s'interposent constamment entre elle et ses textes, confirment par leur présence le statut d'illettrée lié à l'élection divine de Catherine, Scrivo a voi con desiderio di vedervi » 71 ) pour employer une expression directement inspirée de Luc, vol.22